Quels moyens pour protéger ses manuscrits ?
Publication : 06/07/2025 - Temps de lecture 5 min
Une question qui revient souvent lorsqu’on doit faire sortir ses écrits de son cocon, c’est : comment m’assurer que je pourrai me protéger du plagiat ou du vol ?
Ce billet de blog vous propose une liste des possibilités que j’ai explorées au moment de commencer à partager mes travaux avec des tiers. Il en existe probablement d’autres.
Pour les plus pressés, un tableau récapitulatif est disponible en fin d’article.
Rappel du droit d’auteur
Tout d’abord, commençons par un rappel du droit d’auteur et de la propriété intellectuelle en France. Le droit d’auteur est acquis dès la création de l’oeuvre. Contrairement à la protection d’une marque (auprès de l’INPI), il n’y a pas de démarche ou quoique ce soit d’autre à faire. Il est automatique (article L111-1 du code de la propriété intellectuelle).
En cas de plagiat, l’auteur peut donc faire valoir ses droits. Cependant, la question de la preuve viendra se poser : comment garantir qu’on est bien l’auteur de l’oeuvre en question et donc, qu’on a bien l’antériorité de la création ? C’est la date qui fera foi, mais il est toujours difficile de la démontrer : la date de modification de votre ordinateur est relative à celui-ci, pas au fichier. Tout comme les métadonnées d’un fichier peuvent être manipulées.
Avec la volatilité des métadonnées, il convient donc de se faire un dossier de preuves via une observation tierce.
L’auto envoi
L’une des méthodes souvent proposée est la plus simple : l’auto envoi. Qu’est-ce que ça signifie ? Vous envoyez votre oeuvre à vous-même et la date d’envoi permettra d’établir une antériorité en cas de litige.
Par e-mail
Le moyen le plus rapide et gratuit est d’envoyer votre oeuvre à vous-même par e-mail. La date de réception du message est enregistrée dans les entêtes et il n’est pas forcément évident de les modifier. Vous conservez le mail dans votre boîte. Parfois, on verra qu’il vaut le garder en non-lu, mais je doute que ça soit nécessaire.
Par lettre recommandée
C’est la version low tech de la précédente idée. La lettre recommandée est un moyen juridiquement reconnu comme permettant de dater un envoi et sa réception. Par contre, il est un peu plus coûteux puisqu’il vous demandera d’imprimer votre manuscrit et l’envoyer par la poste à vous-même. Le recommandé en ligne ne pourra pas vous servir : il est limité en nombre de pages à imprimer.
Pour économiser du papier, vous pouvez éventuellement imprimer en page doubles au format A5 sur un A4. L’oeuvre et son support matériel sont dissociés du point de vue de la propriété intellectuelle (article L111-3).
Une fois la lettre reçue, il convient de la garder fermée jusqu’à ce qu’il soit nécessaire de l’utiliser comme preuve. L’autocollant du recommandé peut servir de scellé pour démontrer qu’elle n’a jamais été ouverte.
Les coffres-forts numérique
e-Soleau par l’INPI
Si un dépôt à l’INPI n’est pas nécessaire pour un manuscrit, l’Institut National de la Propriété Intellectuelle propose tout de même le service e-Soleau permettant de déposer des documents pour constituer une preuve de création à une date précise.
C’est personnellement le service auquel j’ai recours.
Le dépôt e-Soleau conserva pendant cinq ans les documents et la preuve de dépôt (un certificat cryptographique) qui est juridiquement reconnue et vérifiable. Ce service est payant : 15€ par dépôt avec une capacité de 50 Mo au total pour les fichiers. Moyennant un surcoût, la conservation peut être portée à 20 ans. Il est possible de renouveler un dépôt existant.
Pour ma part, j’ai fait deux dépôts et je profite à chaque fois d’envoyer la totalité de mes écrits. Même si les travaux sont en cours ou incomplet, ça fera toujours une preuve d’antériorité.
Service Hugo de la SGDL
HUGO est un service proposé par la Société des Gens de Lettres (SGDL) dans la même veine que le portail e-Soleau de l’INPI. Il s’agit donc d’un coffre-fort numérique dans lequel les auteurs peuvent déposer leurs oeuvres et obtenir une preuve datée d’antériorité.
Comme e-Soleau, HUGO est un service payant par tranche de 10 € par année de protection désirée. Il délivre également un certificat cryptographique validant l’authenticité du dépôt.
Atramenta
Atrementa est un service de publication à compte d’auteur proposant également plusieurs outils, donc un de protection de manuscrit. L’idée est ici la même que pour e-Soleau ou HUGO : un dépôt de fichier et une preuve numérique valable juridiquement.
La seule différence est que le service ne propose pas de coffre-fort, mais uniquement la délivrance d’un certificat. J’ai utilisé ce service une première fois avant de préférer celui de l’INPI.
Tableau récapitulatif
| Solution | Coût | Avantages | Inconvénients |
|---|---|---|---|
| Envoi par e-mail | N/A | Simple et rapide | Représente une preuve fragile |
| Envoi par recommandé | Coût impression + LR (env. 6 €) | Preuve plus solide à condition de respecter le scellé | Logistique coûteuse. |
| Dépôt e-Soleau | 15 € pour 5 ans | Service fourni par l’INPI, possibilité de consulter son dépôt à tout moment. Possibilité d’envoyer plusieurs fichiers. | Payant avec un coût de renouvellement. |
| Dépôt SDGL Hugo | 10 € par année de protection | Géré par une entité sérieuse et reconnue. Les adhérents bénéficient d’une aide juridique en cas de besoin. | Coût du service plus élevé. |
| Dépôt Atramenta | 9.90 € | Simple et sans limite de durée. Moins cher que l’INPI et la SDGL. | Ne stockera pas le certificat et la preuve, vous devrez les mettre en sécurité. |
Et après ?
Ces moyens de protection ne sont pas magiques : ils n’empêcheront pas une personne malintentionnée d’agir. Cependant, ils vous permetteront de constituer des preuves en cas de dépôt de plainte.
La SDGL propose une procédure de recours pour faire valoir ses droits. La preuve de dépôt avec la date pourra être constatée par un huissier, tout comme la contrefaçon présumée. À partir de là, vous disposez de moyens pour intenter une action en contrefaçon à l’encontre de la publication que vous soupçonnez comme plagiée. Je ne saurais trop vous conseiller de contacter un juriste pour ce genre d’action.