Seb Astien

Auteur de nouvelles de science-fiction

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Un voyage en train

Un voyage en train raconte l’histoire d’un étudiant qui effectue un séjour à bord d’un train de très haute technologie parcourant le monde à destination de la ville où se situe son université. Durant son voyage, il s’émerveillera de l’environnement qu’il découvrira en traversant des régions variées. Il découvrira aussi que son univers est bien différent de ce qu’il pensait. Ce livre est une courte nouvelle de science fiction ajoutant un soupçon de mystère et d’horreur à un monde d’apparence étrangère.

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1.

Comme tiré d’une longue transe, Samuel Williams leva le nez de son livre intitulé Manifeste de l’ingénierie hydromécanique — Première Année lorsque la douce et mélodieuse musique d’annonce du train résonna. Profitant de cette pause pour admirer le paysage défiler à toute allure, il se laissa bercer par la voix féminine qui relatait diverses informations au sujet de la prochaine étape du voyage. La ponctualité des nouvelles de bord n’avait de cesse de l’étonner.

Les communiqués concernant le beau temps et la température de vingt-sept degrés Celsius ne l’intéressaient pas spécialement. Cependant, Samuel écouta les annonces distillées par l’hôtesse, tout en contemplant la région boisée d’Aprilis par cette après-midi ensoleillée.

Elle usait d’un ton calme, posé, sérieux, et, d’une certaine façon, apaisant. C’était le style d’élocution qui vous donnait l’impression qu’il s’agissait toujours de la même personne, peu importe le train ou la gare dans laquelle vous vous situiez. La ponctualité des notifications portait à croire que celles-ci soient préenregistrées, mais les informations communiquées s’avéraient en synchronie avec le lieu et l’instant où la petite musique retentissait.

La qualité de service à bord du train ne cessait d’épater Samuel depuis qu’il avait entamé son voyage. Mais sa curiosité d’étudiant en ingénierie mécanique se voyait surtout stimulée par la machine en elle-même.

Au plus loin de ses souvenirs, tout comme ceux de ses parents, ce train a toujours existé. Il traversait sa ville natale en respectant scrupuleusement le même calendrier. Cette machine qui leur semblait vieille comme le monde n’en demeurait pas moins à la pointe de tout le savoir-faire et l’ingéniosité de l’espèce humaine. Sillonnant le paysage à une vitesse aussi excitante qu’effrayante, ce convoi de quarante wagons reliait les principales cités du globe.

En un mois, ce train fait le tour du monde, se rappela spontanément Samuel.

Pour une raison qui lui échappait, tout comme de nombreux autres passagers, le train parvenait à traverser des zones de leur environnement qui séparent de manière très nette les différentes provinces. Que ce soit la chaîne des montagnes de l’Héral avec ses volcans en constante activité, le continent gelé d’Australis ou encore la région dite de la Brume. L’espace d’une nouvelle étape, c’était sur un pont haut de plusieurs centaines de mètres que le train donnait l’impression de voler au-dessus de l’interminable Fosse des Abysses. Le viaduc de cinquante kilomètres qui traversait cette immense crevasse était l’un des seuls moyens de la franchir. Enfin, ce circuit parvenait à traverser l’océan pour relier les continents.

Depuis la veille, Samuel avait quitté sa ville natale. Fils d’un modeste couple d’ouvriers agricoles, il a toujours été fasciné par la mécanique et l’ingénierie. C’est donc tout naturellement que ses parents lui permirent d’aller étudier et poursuivre sa voie.

L’Université d’Augusta, sa destination, était située à quatre jours de trajet en utilisant le train. C’était la première fois qu’il voyageait aussi loin de ses origines. C’était d’ailleurs la première fois qu’il voyageait, tout simplement. Le décor qui défilait devant lui donnait l’impression d’avoir quitté la planète pour partir explorer des régions étrangères.

Naturellement, Samuel n’était pas un ignare en géographie. Il l’avait étudiée à l’école. Mais entre les récits des livres et l’observation réelle, il y avait là un contraste important.

Aprilis était un exemple assez intéressant de territoires que ses jeunes yeux de dix-neuf ans n’avaient encore jamais vu. Il a grandi dans une région plus aride. Il s’agissait avant tout d’un bassin minier de population majoritairement ouvrière. Elle vivait en outre de l’extraction des ressources du sol, mais aussi d’une forme d’agriculture produisant des fruits et légumes habitués à pousser sur une terre que n’importe quel autre fermier pourrait considérer comme ingrate. Januaris se résumait donc à du sable, du terrain ocre, et le soleil toute l’année. Si la région était relativement boisée, elle ne pouvait en rien être comparée avec Aprilis.

Aprilis était le parfait opposé de Januaris. Verdoyante, traversée de longs et larges fleuves d’eau claire, parsemée d’immenses arbres qui laissaient tout de même filtrer la lumière du soleil que les feuilles reflétaient d’une façon surnaturelle. Enfin, elle possédait aussi une faune diversifiée.

Il était difficile de les observer en raison de la vitesse du train. Mais Samuel parvint à voir au loin un des plus singuliers spectacles de la province : une nuée de papillons qui, en prenant son envol, donnait l’impression d’apercevoir un arc-en-ciel vivant.

Cette vision féerique avait laissé plus d’un naturaliste en extase, et Samuel pensa ressentir la même sensation. Il se remémora durant sa scolarité les récits du grand explorateur Nigel Van Enhoorte qui avait dépeint ce spectacle avec une certaine envolée lyrique.

En réalité, pas de magie dans cette image. Les différentes espèces de lépidoptères d’Aprilis présentaient un point commun : leurs ailes se constituaient d’une matière rigide et translucide ressemblant à du verre. Les effets qu’ils provoquaient n’étaient rien de plus que la lumière qui se réfléchissait et décomposait en arc-en-ciel sur la surface de ces membranes.

— Magnifique, mais potentiellement mortel, entendit Samuel à côté de lui.